En coulisses avec Laetitia Veniat des éditions Bel et Bien

En coulisses avec Laetitia Veniat des éditions Bel et Bien

Comment vous est venu l’idée de travailler dans l’édition ? Avez-vous toujours eu envie de travailler dans ce domaine ? Pourquoi avoir créé votre propre maison d’édition ?

 

À l’origine, c’était une sorte de travail de recherche universitaire, de pari étudiant, de voir si on pouvait faire un album jeunesse accessible qui soit beau. C’était vraiment ça l’idée. Et aussi de rassembler des gens autour d’un même objet-livre.

 

On avait envie de voir si de la littérature jeunesse, illustrée de façon fine, artistique, esthétique, avec en plus des textes à forte valeur littéraire, pouvait être rendue accessible. J’ai été libraire avant et souvent quand les parents ou les accompagnant·es me demandaient des textes accessibles, ce que je leur présentais et ce qui existait – aux alentours de 2018-2020 – étaient décevants pour eux. En fait, ce n’était pas un beau livre, un bel album comme ce à quoi on pouvait s’attendre.

 

Quelle est la ligne éditoriale de votre maison d’édition et comment celle-ci se démarque-t-elle ?

 

 

 

La ligne éditoriale de Bel et Bien, c’est vraiment le partage et la rencontre, que chacun·e se sente représenté·e et puisse faire entendre sa voix. On souhaite offrir des expériences qui soient à la fois singulières mais au sein du collectif. C’est-à-dire que nos lecteur·ices puissent s’inscrire dans des communautés de lecteurs et de lectrices.

« À l’origine, c’était une sorte de travail de recherche universitaire, de pari étudiant, de voir si on pouvait faire un album jeunesse accessible qui soit beau. C’était vraiment ça l’idée. »

Quel livre avez-vous préféré éditer ?

 

Souvent ce que je dis c’est Fil de line parce qu’en fait c’est un texte qui est très exigeant. Je suis allée chercher une plasticienne et non pas une illustratrice jeunesse. Et j’avais envie de me faire plaisir. Ça a été une vraie expérience créative pour moi et pour le graphiste qui m’a accompagnée dans ce travail. Il a fallu finalement s’approprier les propositions de deux artistes pour les mettre en résonance, jusqu’à fragmenter leur proposition et donc déconstruire des œuvres – avec leur accord, tout avait été verbalisé avant. Mais celui pour lequel j’ai pris le plus de plaisir c’est aussi parce que c’est celui qui a mobilisé ma créativité personnelle. 

 

Quelle est votre dernière sortie ?

 

 

La dernière sortie dans l’ordre chronologique c’est Moi monde, c’est un album jeunesse qui questionne la place et les choix d’orientations qu’on a tout au long de notre vie, qui questionne notre relation à nous-même, à nos familles, à celles et ceux qui nous entourent, à notre environnement. C’est un album qui est vraiment fait pour réfléchir sur ce qu’est grandir, et comment on peut s’émanciper et exister en toute conscience, en toute liberté sur notre planète. C’est un album qu’on avait vraiment pensé pour des enfants de 7 à 8 ans mais on se rend compte qu’il a aussi une résonance sur les jeunes adultes et sur les personnes qui réfléchissent encore à qui elles sont et aux choix qu’elles font. On l’utilise aussi bien au collège qu’au lycée, voire même avec des étudiants de l’université et professionnel·les du livre et de l’orientation. Ce n’est pas un album qui est universel, mais c’est un album qui a une résonance pour beaucoup de monde. 

« C’est un album qui est vraiment fait pour réfléchir sur ce qu’est grandir et comment on peut s’émanciper et exister en toute conscience, en toute liberté sur notre planète. »

Et vos prochaines parutions ?

La prochaine parution c’est Le festin de Salem, c’est une réédition d’un texte que j’avais moi-même écrit il y a quelques années pour les éditions M. le Comte et la fabulerie. Et en fait c’est le crossover entre différents contes de Perrault et la littérature anglaise, sur un fond de salsa du démon. C’est très tonique, ça met en scène des sorcières de différentes communautés, ça donne à voir une famille d’ogres d’un point de vue de l’hyperconsommation et de notre rapport à la nature. C’est assez jubilatoire comme texte. C’est illustré par Eloise Mokhtari qui a illustré à la plume et à l’encre de Chine, en y apportant des touches de couleurs qui évidemment renvoient directement aux contes de notre enfance. 

 

Quelle est votre dernière lecture ?

 

Si je vous parle de ma dernière lecture actuelle, c’est celle que je m’impose en tant qu’enseignante en littérature de jeunesse, c’est-à-dire que j’ai enfin ouvert Le prince cruel. Et sinon, la dernière lecture marquante que j’ai eue c’est une lecture que j’ai choisie au sortir du prix Abracadabra de la librairie Combo, qui s’appelle Enterrer la lune. C’est l’histoire d’une jeune fille qui va se rebeller pour les femmes de son village en Inde, afin qu’elles puissent continuer à aller à l’école une fois qu’elles ont leur règle ou plus de 12 ans. Puisqu’en fait, toutes les femmes du village doivent se cacher la nuit et très tôt le matin pour aller dans le champ de la honte faire leurs besoins. Cela entraîne des drames personnels comme au sein du village, avec des maladies, des décès. Et c’est une enfant qui a une dizaine d’années qui va oser prendre la parole devant un politique. C’est inspiré d’une histoire vraie, les autrices sont Indiennes et c’est écrit en vers libres, illustré tout entièrement au crayon de bois. C’est publié aux éditions Alice. 

 

Propos recueillis en marge de la Foire du Livre de Bruxelles.